Le quartier des Quatrans - Caen


Alors que la première période de la reconstruction suit les canons d'un urbanisme en ordre continu, la seconde qui débute vers 1954 est davantage dominée par les doctrines des modernistes. Sans doute liée aux pressions plus fortes des modernes (majoritaires au MRU) sur Brillaud de Laujardière, le poids moins prégnant de la municipalité dans la reconstruction (Yves Guillou est malade -il meurt en 1963-) et l'urgence de reloger, l'expression d'un urbanisme néo-haussmannien se délite progressivement au profit de concepts hérités en partie de Le Corbusier (le sud de la rue Saint-Jean offre également un urbanisme en îlots ouverts). En discontinuité totale avec le reste de la ville, le quartier présente des barres et une tour placées perpendiculairement à la rue de Geôle ; cette dernière devant à l'origine être en partie reconstruite selon les plans initiaux de l'architecte en chef : façades le long de la voie qui épousent le tracé courbe de l'artère. Le maillage traditionnel du plan d'ensemble de la reconstruction est ainsi rompu et le tampon formé entre château et tissu urbain sauvegardé est saisissant.



Rompant avec le système de superposition des voies piétonnes et automobiles, les Quatrans obéissent à une logique différente : les piétons et les véhicules motorisés ont leurs propres voies.
Édifiés au même moment avec les mêmes plans et des matériaux similaires (ciment et béton et sur quelques-uns parement de pierre calcaire), les immeubles des Quatrans sont pourvus d'un toit en terrasse couvert de plomb et reposent sur des pilotis. Les éléments de conforts, nombreux, se retrouvent dans les loggias, les séchoirs des balcons, la grande luminosité dont jouissent les logements...


Achevé en 1958 (et accueilli avec enthousiasme par la population), ce pan de la ville devait présenter espaces verts aérés et cheminements piétons. Aujourd'hui, ce sont essentiellement des parkings qui composent cet espace. Pour les uns, le quartier des Quatrans est une touche moderne bienvenue dans un plan d'ensemble urbain bien sage. Pour d'autres, il constitue le principal ratage de la reconstruction : la maison des Quatrans épargnée par les bombes se trouve isolée, le château repoussé et l'université comme éloignée du centre-ville.